PARLONS ENDOMÉTRIOSE


Samantha Henry
Je suis Samantha. J’ai 28 ans et « célébrerais » probablement mes 29 ans dans la superbe chambre 4 étoiles d’un hôpital parisien. En guise de cadeaux, une magnifique laparoscopie, ainsi qu’une superbe iléoscopie ! Je serais trop gâtée.
Et pour cela, je dois remercier « Madame Endo ». C’est une « vieille amie » très (trop) fidèle. Effectivement, nous avons fait connaissance de façon fortuite il y a environ 8 ans. Mais en vérité, nous nous connaissons depuis plus longtemps, depuis mes premières règles vers 12 ans. Elle était là insidieuse, vivant dans mon ombre. Mais alors, la discrétion n’était pas son truc. En effet, elle a tout de suite marqué son territoire à mon insu, et m’a appris une règle simple : règles = douleurs. La leçon fut vite retenue, c’était simple après tout, tout le monde le savait bien. De toute façon, je n’étais pas la première et ne serais pas la dernière.
Ainsi, chaque mois, j’étais résignée à être pliée de douleurs, à manquer 1 ou 2 jours d’école, ou à y aller et demeurer couchée sur les tables, incapable de suivre. Très vite aussi, j’ai appris à faire face aux réflexions : « tu es vraiment douillette ! », « la malade imaginaire », « la grande malade », « ce n’est pas normal d’avoir aussi mal »… Et pourtant, la douleur devient « Normale », je m’y habitue, je m’adapte, mais je ne l’oublie pas et c’est comme ça que je fais la connaissance de Mme ENDO, par lintermédiaire de mon médecin traitant. On me la présente comme étant la responsable de mes douleurs, et comme celle pouvant m’empêcher de devenir mère : sacrée claque à 20 ans…
Il me faut donc faire la connaissance d’un gynécologue. Après plus d’un an, plusieurs traitements inefficaces, plusieurs consultations express (vous pensez bien qu’une jeune fille consultant pour dysménorrhées c’est banal et barbant, il faut vite passer à autre chose). Ce « très gentil et agréable » gygy, finit par me prescrire une IRM. Et là, tout le monde se veut rassurant : « Non Mademoiselle vous n’avez rien du tout ». Mais le « gentil » gygy, a décidé de prendre mes douleurs au sérieux. Visiblement, me rendre en consultation avec ma blouse blanche d’étudiante infirmière, m’a rendu soudainement plus crédible. Il veut que je fasse une cœlioscopie. Mais n’ayant déjà plus confiance dans ce gygy et surtout, ne voulant pas de cette « Amie » dans ma vie, je pose un voile sur tout cela. Je veux avancer : diplôme, spécialisation, travail et alors que je ne l’avais pas prévu ; une grossesse ! Mme ENDO s’éloigne peu à peu, je l’oublie et je me dis que ce n’était qu’une ombre, car Maëlys, ma fille, ma vie : elle est là !
Mais Mme ENDO est une amie collante, qui se bat afin de rester à mes côtés. Une fois le bonheur de la naissance retombée, quelques mois à peine, elle est toujours là, de plus en plus bruyante ; elle me plie, me secoue. Chaque mois de plus en plus présente, elle m’offre des cadeaux de plus en plus imposants, de plus en plus invalidants. Les douleurs sont violentes, je les compare à mes contractions. Elles s’accompagnent de nausées, vomissements, constipation douloureuse puis diarrhée, je pense même faire des gastro-entérites à répétition. Des douleurs lombaires, douleurs sacrées, douleurs de sciatique, mais après tout je suis infirmière, c’est certainement dû au travail, ou à la césarienne ou encore à la péridurale. Ces cadeaux deviennent pesants, je suis fatiguée, parfois vidée, cette impression que quelqu’un a appuyé sur le bouton off. Et pour moi, ce n’est pas normal : je ne suis pas NORMALE. Je me dis que tout est dans ma tête, que je ne peux pas être aussi mal tous les mois. Après tout, les autres femmes ne souffrent pas autant. J’en parle à mon nouveau Gygy, sans pour autant croire à une quelconque considération. La douleur, elle n’est pas palpable, elle est personnelle, propre à chaque individu. Et là, je suis écoutée, entendue, considérée. Elle est enfin présentée officiellement : Mme ENDOmétriose.
C’est une grande Dame. A l’IRM elle se dévoile : imposante, ayant une affection très particulière pour mon système digestif. Mon super Gygy m’explique qu’elle fait partie de ma vie, mais que je peux à l'aide des médicaments essayer de la tenir un peu à distance. Je pourrais aussi tenter une mesure d’éloignement plus radicale, mais dont l’efficacité n’est pas fiable à 100% et présente des risques.
Je « choisis » la première méthode d’éloignement. Au début, Mme ENDO, semble se tenir un peu à distance, mais elle est assez tenace et s’immisce petit à petit. Elle est maintenant omniprésente. Elle est plus vicieuse. Et elle s’est affirmée, a pris de l’assurance. La douleur est chronique, moins importante, mais quotidienne, insidieuse, vient et repart, donne des coups de poignard, pas longtemps, juste assez pour me plier. Elle m’isole, la fatigue et les douleurs tendent à ce que je désire être seule, souvent, très souvent. Mais tenter de l’éloigner a un prix. Un prix qui se calcule en kilos entre autres, 6 kilos c’est peu comparé à certaines, mais trop pour moi. J’en ai marre, je ne contrôle plus rien. Je suis à son service : c’est elle qui décide et moi je n’en peux plus. Je me résigne donc à tenter la méthode plus radicale, mais là encore, elle s’affirme. Le parcours du combattant commence : sécurité sociale, administrations, prises en charge, arrêts de travail, aller-retour Fort-de-France/Paris, démarches, courriers, demandes voire supplications, financement, dépenses. Le plus dur est la séparation parce que pour Mme ENDO, il faut des spécialistes, qui ne sont pas sur mon île, alors il me faut partir loin de mes proches, de mes amis, de mon mari et de ma fille.
J’ai baissé les bras, j’ai pleuré, j’ai craqué et certainement que je referais tout cela encore, mais je me battrais. J’afficherais ce sourire, ce sourire que TOI, Mme ENDO, tu veux me voler. Je t’ai déjà fait un joli pied de nez, une première fois en donnant la vie malgré toi. Et je recommencerai ou en tout cas je ferai tout pour reprendre le contrôle. Parce que dans mon malheur, j’ai la chance et le bonheur d’être entourée et soutenue : Mes 1ers piliers, ma fille et mon mari, qui vivent au quotidien cette maladie, Ma FAMILLE, au sens large, mes amis et collègues… tous autant qu’ils sont et qui de près ou de loin tendent à me donner la force de tenir, de me battre et de continuer à SOURIRE.
Je suis Samantha, une Endogirl !
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